Avec un toit rétractable électriquement, la vie en supercar change radicalement. Illustration avec la Mc Laren 720S Spider : le petit truc en plus, c’est un tout petit toit (presque) en moins.
Qu’il est loin le temps où Mc Laren, pour faire son entrée fracassante dans le monde des voitures homologuées sur route, n’avait envisagé qu’un seul modèle : l’exceptionnelle F1 à moteur V12, enfantée par les équipes du non moins exceptionnel ingénieur Gordon Murray. C’était il y a bientôt 20 ans, et la voiture est vite entrée dans la légende. Puis Mc Laren s’est éclipsé une dizaine d’années avant de revenir en 2011 avec programme bien plus charpenté et échafaudé dans le temps.
Aujourd’hui, la gamme est structurée autour de trois familles, quatre si l’on compte la GT, tournée autour du luxe et du raffinement : Sport Series (les 540, 570 et 600 LT et 620R), les Super Series (720S et 765 LT), et enfin les Ultimate Series (Senna, Senna GTR, Elva et Speedtail). Naturellement, on classerait l’entrée de gamme, si l’on peut dire ainsi, dans la catégorie des supercars, puisque l’ADN est là (moteurs V8, structure carbone, aéro déjà aboutie), c’est celui d’une voiture de compétition homologuée sur route ouverte.
Mc Laren a le bon goût de considérer que les très hautes performances peuvent se vivre à l’air libre. Dès les Sport Séries, dont la redoutable et attachante 570S, le Spider à toit escamotable électriquement est disponible sur les 570S et 600 LT (pour Long Tail). Il n’y avait donc aucune raison pour que ce ne soit pas possible un cran au-dessus, avec la 720S née en 2017, qui, comme son nom l’indique, envoie 720 chevaux.





Onze secondes. C’est le temps qu’il faudra à la McLaren 720S pour ranger son toit (électriquement) dans un petit compartiment à l’arrière et libérer la vue vers le ciel. Ou ce sera le temps nécessaire pour franchir approximativement les 250 km/h depuis un départ arrêté. Ces performances vertigineuses paraissent encore plus folles quand le coupé devient cabriolet. La commande magique est accessible, en bas de la console centrale flottante, sous l’enfilade de boutons commandant la boîte de vitesses et les sélections D, N et P. Ce qui permet d’observer au passage l’absence de levier de vitesses « physique », qui ne permet pas d’égrener les rapports manuellement. Tout se passe automatiquement ou avec les palettes au volant.
Revenons au toit : onze secondes pour l’escamoter, c’est un score plus qu’honorable, mais avec le pedigree d’une Mc Laren rappelle qu’en général et quand les conditions le permettent, on n’a pas de temps à perdre avec ce genre d’auto d’exception. Onze secondes, c’est un peu plus que le temps nécessaire pour décapoter manuellement une Mazda MX-5 (entre trois et secondes selon que l’on soit plus ou moins habitué). La cinématique du toit paraît simple : un capot à l’arrière se lève, le toit en une seule partie est reculé, descendu, puis le capot se referme. Les montants latéraux, qui se prolongent également jusqu’à la queue de la voiture, restent en place. Entre eux, pas de filet anti-remous disgracieux mais une fine lame façon Plexiglas. D’où le sentiment d’un espace autour de la tête pas vraiment libéré. Mais suffisant pour sentir les effets des cheveux au vent.



Pas question de céder quoi que ce soit à l’efficacité, puisque la Mc Laren 720S reste une redoutable mangeuse de piste. Avec elle, c’est un enivrant voyage au son du V8 biturbo de 4 litres qui développe 720 ch à transmettre aux roues arrière. La mélodie est phénoménale, chaque poussée aussi à condition de bien jauger le niveau de gras de la chaussée et ses éventuelles déformations.
Si, pour vous, cabriolet est synonyme de balade confortable, la 720S Spider s’en contrefiche. Elle reste une pistarde née, bâtie autour d’une coque tout en carbone, matériau qu’on retrouve un peu partout. Indispensable pour la rigidité que le toit repliable ne doit pas entamer. Essentiel aussi pour juguler le poids, ici à 1 330 kilos. C’est une petite cinquantaine de kilos de plus que le coupé fermé. Une valeur exceptionnelle qui favorise la vitesse maxi, donnée pour 341 km/h.
La fiche technique laisse rêveur, avec 770 Nm de couple autour de 5500 tr/mn, un régime maxi digne d’un moteur atmo, en dépassant les 8000 tr/mn. Il est donc naturel, pour la 720S, de sortir glorieuse d’un 0 à 100 km/h en 2,9 secondes, dans un son assez rocailleux. Les 300 km/h sont en théorie atteints en 20 secondes.
Comme ses rivales dotées d’un niveau de puissance similaire, la 720S Spider est une oeuvre d’aérodynamisme, qui se termine sur la partie arrière par de véritables sculptures chargée à la fois de faire glisser le vent et de capter l’air pour le refroidissement. Comme sur la MP4 12C, l’échappement est planqué entre les deux, juste en-dessous de l’aileron en carbone amovible.








Compétitrice née, la voiture remonte « naturellement » assez sèchement dans le cockpit toutes les aspérités qu’elle pourra rencontrer. Là encore, c’est indispensable pour tenir une bête qui fait vite savoir qu’elle se mérite. On monte dans une voiture, on descend dans une 720S Spider. La manœuvre (inélégante sans doute me concernant) est facilitée par l’échancrure dans le châssis, pas par la porte à ouverture en élytre.
À la mise en route, le combiné d’instrumentation pivote en quelques secondes et c’est toujours un moment magique. Mieux vaut ensuite repérer la commande épurée du « lift » – qui permet de lever le nez de l’auto pour franchir un dos d’âne – plutôt que les fonctionnalités de l’écran central, dépassé. Si la voiture conserve le nez levé à basses vitesses, l’assiette de la 720S redescend automatiquement dès que l’allure s’élève.




Pour le reste, il suffit de composer avec une visibilité périphérique désastreuse et un certain sens du dosage et d’anticipation en circulation courante. En revanche, on prend (très) vite goût au rétrogradage systématique de la boîte à double embrayage à sept rapports, à coup de gaz après un freinage. Comme on devient addict au ciel au-dessus de la tête, d’ailleurs, qui peut défiler très vite à longueur de coups de pied au cul si le coeur vous en dit. Ceci dit, la 720S Spider peut faire preuve de douceur relative en mode 100% automatique. Ce qui reste assez surprenant, au demeurant, et utile pour profiter d’un habitacle épuré entièrement tapissé d’alcantara si le budget le permet.