Il y a trente ans, le record absolu de vitesse tombait aux 24 Heures du Mans

Lors des 24 Heures du Mans 1988, le record de vitesse maxi relevé pendant l’épreuve était battu : 405 km/h dans la ligne droite des Hunaudières. Il est l’oeuvre de Roger Dorchy au volant d’une WM. Record toujours à battre.

WM P88 Heuliez

Il y a trente ans, les 24 Heures du Mans connaissaient un grand moment de sport automobile. Ou de folie pure, c’est selon.  Une voiture établissait un nouveau record de vitesse : 405 km/h dans la ligne droite des Hunaudières. Ce record est toujours détenu par Roger Dorchy, qui l’a établi au volant d’une WM.

WM, c’est l’association de Gérard Welter et de Michel Meunier. Le premier est connu pour être un pilier du style Peugeot. Le deuxième bosse aussi dans les bureaux d’étude du Lion. Ils sont fondus de compétition, au point de créer leur propre écurie en 1969. WM ambitionne de participer aux 24 Heures en 1976. La P76 est équipée d’un moteur Peugeot, le V6 PRV. L’écurie continue En 1980, elle accroche la quatrième place, avec le soutien officiel de Peugeot, et d’un nouveau sponsor, Heuliez. Le carrossier de Cerizay suivra, comme Peugeot, l’évolution de WM aux 24 Heures, jusqu’à cette fameuse année 1988. L’année précédente, la voiture préparée par WM est des plus rapides. Elle aurait été chronométrée à plus de 400 km/h sur un tronçon d’autoroute bloqué pour des essais. Au Mans 1987, la P87 est chronométrée à 379 km/h. Le record à battre est alors de 391 km/h, détenu par Porsche.

Le développement se poursuit et pour l’édition 1988, la WM P88 entièrement aux couleurs d’Heuliez, en livrée verte et blanche, a été étudiée en collaboration avec le carrossier en soufflerie. Deux voitures sont alignées au départ. L’une d’elles abandonne rapidement. Reste alors un exemplaire pour combler un désir un peu fou : dépasser les 400 km/h sur le circuit sarthois. Un défi qui n’est pas sans danger : la mécanique supportera-t-elle les contraintes ? La voiture ne risque-t-elle pas de décoller du sol et de se crasher ?

Faute de pouvoir jouer la gagne et d’avoir la certitude de rallier l’arrivée, la P88 numéro 51 est poussée dans ses retranchements. La légende dit que la P88, avec son moteur V6 PRV biturbo de 3646 cm3 et 900 ch, aurait atteint bien davantage que les 400 km/h peu avant 21 h. On parle de 409 km/h. Mais l’histoire « médiatique » retiendra surtout les 405 km/h, exploités par les communicants de Peugeot, qui mettent en avant ce chiffre pour faire allusion à la Peugeot 405, en plein lancement commercial. Cette année-là, la P88 abandonne dans la nuit.

«  L’auto était très fine aérodynamiquement. Comme on a vite compris que la mécanique ne tiendrait pas jusqu’à l’arrivée, on s’est dit que tant qu’à être au Mans, autant essayer de faire un truc. On a augmenté la pression de turbo et j’y suis allé… Le plus compliqué était de ne pas s’envoler. La ligne droite était bosselée. On y a vu des Mercedes décoller alors qu’elles avaient plus d’appui que nous. Mais c’est un truc que je ne referais pas aujourd’hui. Plus la vitesse augmentait, plus je me disais « vivement que le bout de la ligne droite arrive ! » En même temps, qu’un incident se produise à 300 ou à 400 à l’heure, le résultat aurait été le même… » racontait Roger Dorchy au Courrier Picard en 2014. « Quand je suis rentré au stand pour passer le relais à mon coéquipier, j’ai vu toutes les télés et tous les journalistes qui m’attendaient. Je ne comprenais strictement rien à cette effervescence. On m’a alors informé que j’avais battu le record de vitesse du Mans dans les Hunaudières », disait-il au Parisien en 2002.

WM participe pour la dernière fois aux 24 Heures du Mans en 1989. L’année suivante, l’installation de chicanes sur la ligne droite des Hunaudières compromet toutes vélléités d’explosion du record. C’est pourquoi le record de Roger Dorchy et de la WM P88 devrait rester imbattable.

La WM P88 numéro 51 du record a été conservée dans les murs de l’usine Heuliez de Cerizay, mais sans moteur. Endommagé, il avait été repris par Gérard Welter. En 2010, elle est classée à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, avec deux autres études Heuliez, la Citroën SM Espace à toit ouvrant rétractable à lamelles, et l’étude de Taxi H4 sur base de Peugeot 204.

En 2012, la plupart des études et prototypes d’Heuliez sont vendus aux enchères en juillet 2012 au Mans Classic. Artcurial lui trouve un preneur pour 119 136 € frais inclus. Il est alors question, à l’époque, d’envisager de lui réimplanter son moteur. C’est en tout cas ce qu’avait laissé entendre Artcurial, à propos du moteur, en 2012 : Gérard Welter « le détient toujours, et se tient à la disposition du futur acquéreur pour éventuellement le céder et le remettre en condition, après devis. » Le projet n’aurait à ce jour pas abouti. Hélas, Gérard Welter est décédé en 2018. Quant à Roger Dorchy, il la pris sa retraite sportive en 2003. Mais son nom restera à jamais associé à l’une des légendes des 24 Heures du Mans.

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