C’était le 23 janvier, sur l’autoroute A1, au péage de Fresnes-lès-Montauban, près d’Arras. Des manifestants en colère font une opération péage gratuit quand, dans le flot de camions, surgit un chargement pas comme les autres…

Le 6 janvier, les 334 salariés de la papeterie Stora Enso de Corbehem, entre Arras et Douai, apprenaient que leur usine fermerait ses portes définitivement. Adieu la machine 5, construite en 1990 pour plus de deux milliards de francs à l’époque. Une des plus belles machines du monde en son temps, qui reste l’une des plus impressionnantes en Europe : elle pèse 6.000 tonnes et a pris place dans un hall spécialement conçu de trois cents mètres de long. L’usine de Corbehem est la dernière en France à produire du papier couché pour catalogues et magazines (LWC). Mais le groupe Stora Enso n’en veut plus.

Le 23, pour faire entendre leur désarroi, les salariés se lancent dans une opération escargot exceptionnelle, qui trouve son terminus au péage de Fresnes-lès-Montauban, sur l’autoroute A1. Opération blanchiment de la chaussée et péage gratuit au programme… La plupart des manifestants sont des futurs chômeurs, et ont décidé de se battre pour partir avec un maximum d’acquis de leur côté.

Les papetiers de Corbehem vivent un drame social, humain. Luttant pour leur survie économique, ils voient apparaître, dans la file d’attente au péage, le symbole du luxe, qui ne se porte jamais aussi bien qu’en période de crise : un camion chargé de sept Maserati Quattroporte, sous leur bâche. Suivi d’un deuxième. Le prix de chacune des voitures cachées, ils ne l’obtiendront jamais en indemnités.

Une Maserati Quattroporte, c’est 109.500 € minimum. Les papetiers ont vu défilé devant leurs yeux, en quelques secondes, plus d’un million et demi d’euros. Contraste saisissant, non ?