A l’automne 2009 a débarqué sur le marché français une étonnante proposition signée Suzuki : la Kizashi, une grande berline de 4,65 m, un gabarit et une catégorie que n’avait jamais explorés le constructeur nippon, davantage habitué aux citadines et aux petits 4X4. Mettre un pied chez les premium, en France, sans motorisation à gazole, ça sentait le fiasco commercial à plein nez. En 2012, seulement vingt et une Kizashi ont été vendues dans l’Hexagone. Attention, collector en vue…
Encore fallait-il savoir qu’elle existait, la Kizashi, pas loin de la fin de sa courte carrière en France. Suzuki n’a jamais misé beaucoup de yens sur sa grande berline, en France tout du moins, pour la montrer au public. Le constructeur a-t-il cru un jour en son vaisseau amiral ? La Kizashi marque l’entrée de Suzuki dans le segment premium, avec des prestations bien loin de préoccuper l’automobiliste français : livrable avec une transmission intégrale, une boîte à variation continue, et uniquement avec un moteur qui donne le sourire au Trésor public : un 2.4 de 178 chevaux affichant fièrement, avec les deux équipements précités, 11 chevaux fiscaux et surtout 191 grammes d’émissions de CO2.
Pas le moindre diesel de 130 ou 150 chevaux au programme. Un vrai hara-kiri commercial en bonne et dûe forme. Suzuki est allé au bout de sa logique en ne proposant qu’une seule finition, bien équipée, perchant les tarifs à 28.500 (Kizashi 2.4 4X2 boîte manuelle) et 32.000 euros (Kizashi i-AWD 2.4 CVT). A ce tarif-là, les Allemandes bien établies, gavées au gazole, pullulent. C’est sans compter le malus écologique débile qui handicape la Kizashi 4X2 de 2.600 euros, et la i-AWD de 5.000 euros !
Si la proposition est « exotique », plus appropriée aux habitudes des conducteurs suisses, russes, ou japonais, elle mérite d’être découverte. Tout comme le design, discrètement sportif : la double calandre grillagée, les jantes de 18 pouces en série, les bas de caisse prononcés et la poupe sculptée, avec l’aileron en queue de canard et la double sortie d’échappement, en font un engin au caractère trempé, et bien différent. Quelle gueule, cette Kizashi ! La bête a attiré les regards, pendant cet essai, et j’ai même eu droit à un compliment d’un éboueur, devant chez moi, m’expliquant qu’il la trouvait belle.
Dans l’habitacle, le soufflé retombe un peu, même si on retrouve un design agréable, nettement plus commun, perturbé par des plastiques au grainage pas assez fin, et des indications relatives à la radio ou à la clim assez vieillottes. Dommage, car l’équipement est complet, dans cette finition unique : feux au xénon, toit ouvrant électrique, clim bizone, sellerie en cuir avenante et sièges chauffants à réglages électriques. La seule (grosse) erreur, c’est l’absence de système de navigation, même en option. Quasi impardonnable, à ce niveau de prix. Le système de démarrage sans clé, en série, n’est pas le plus convaincant ni le plus pratique quand il faut verrouiller ou déverrouiller les portes, par un appui, ou deux, sur la poignée de porte.
L’ambiance intérieure et extérieure fleure bon la sportivité, et avec 178 chevaux sortis d’un gros 4-cylindres de 2.393 cm3, on peut s’attendre à du caractère. Mais le poids de la transmission intégrale (environ cent dix kilos de plus que sur la version à deux roues motrices) pour arriver à une masse à vide de 1.530 kilos, et surtout la transmission à variation continue CVT, émoussent le plaisir de cravacher cette Kizashi. Le châssis sport et les jantes de 18 pouces laissaient envisager le meilleur.
Mais la boîte CVT se donne trop de peine pour laisser mouliner le moteur, et le laisser perché trop haut dans les tours, même quand le besoin ne se fait plus sentir. L’utilisation de la boîte en mode séquentiel au levier (on tire vers soi pour passer le rapport supérieur, et on pousse pour rétrograder) ou par les petites palettes derrière le volant amenuisent le poids du désagrément, sans l’annihiler. D’ailleurs, avec la CVT, bien qu’il s’agisse en théorie d’une boîte à un seul rapport, les indicateurs de changements de vitesse en recensent six.
Toujours est-il que l’impression qui demeure, c’est d’avoir sous la main une boîte peu réactive, qui, dans la réalité, fait boire le moteur 2.4 plus que de raison. Sans forcer le rythme, on arrive facilement à une moyenne de 12.5 l/100 en ville. Impossible de passer sous la barre des 10 l/100 en variant les parcours, tandis que le trajet autoroutier entre le Pas-de-Calais et les Yvelines permettra de descendre sous les 9 l/100 à allure réglementaire… et avec les limitations de vitesse en région parisienne pour précieuses alliées. Le niveau d’émissions de CO2, de l’ordre de 191 grammes, m’avaient pourtant mis la puce à l’oreille. La version à boîte méca fait apparemment un peu mieux en émissions (183 grammes), comme en performances (une seconde de mieux au 0 à 100 km/h, pour atteindre 7,8 sec. et 10 km/h de mieux en vitesse de pointe, à 215 km/h) mais c’est surtout l’agrément de conduite qui doit y gagner. Je n’ai pas pu le vérifier.
Opter pour la boîte méca ou CVT oblige à faire une croix, ou à imposer la transmission intégrale. En clair, c’est boîte CVT et transmission intégrale, ou boîte manuelle avec deux roues motrices. Notre Kizashi d’essai étant une version CVT à quatre roues motrices, il suffit d’appuyer sur un bouton au tableau de bord pour activer le mode 4X4. Quand les conditions d’adhérence sont normales, ce sont les deux roues avant qui entraînent la voiture, et l’électronique fait le boulot en toute transparence quand les conditions se dégradent. Il n’y a plus qu’à profiter sereinement d’un confort sonore et vibratoire de bon aloi, et d’un espace habitable honnête pour 4,65 m de longueur.
En bonne berline tricorps qui se respecte, la Kizashi n’est pas la déménageuse rêvée. Seuls les dossiers de la banquette se rabattent, après avoir plié les appuie-têtes grâce à un petit dispositif malin. Dans ce cas-là, le chargement d’objets longs, ou même de bagages classiques, révèlera l’horreur : le subwoofer sous la plage arrière, qui permet au système audio de distiller un son d’excellente qualité, paraît fixé à la va-vite. Sans protection, il est carrément vulnérable. Il n’y a pas plus de garniture près de ce subwoofer, et on a donc tout le loisir d’examiner les câbles apparents, l’éclairage franchement indigne, et ces parties de carrosserie non peintes. Histoire d’enfoncer le clou, le volume de chargement (465 litres) est entravé par les retours qui dissimulent les charnières de coffre. La partie arrière, c’est celle à oublier le plus vite, dans la Kizashi.
Le bilan
Malgré ses défauts qui la rendent incompatible avec les goûts des automobilistes français (peut-être sont-ils mal éduqués), à savoir une consommation déraisonnable, une boîte CVT parfois pénible, et certains détails de finition qui laissent à désirer, cette Suzuki Kizashi possède un charme et un charisme fous. Elle donne l’impression d’être en perpétuel décalage avec les autres automobilistes. Son design sculpté n’est pas si commun qu’il peut en avoir l’air. L’équipement ne souffre que de l’absence d’un système de navigation pour justifier les 32.000 euros demandés. C’est un peu trop élevé pour prétendre à un face-à-face dans les règles avec les ténors de la catégorie. Les constructeurs français s’y sont cassé les dents sur leur marché domestique. Alors un petit Japonais qui fait ses débuts dans le haut de gamme…
Suzuki Kizashi Sport 2.4 VVT CVT i-AWD
- 32.000 euros hors malus écologique débile
- 2.393 cm3
- 178 chevaux
- Boîte CVT (six vitesses en mode séquentiel ou palettes au volant)
- Emissions de CO2 : 191 gr/km
- 11 CV
- Vitesse maxi : 205 km/h
- 0 à 100 km/h en 8.8 secondes
Equipement de série
- Régulateur/limiteur de vitesse
- Sellerie cuir
- Climatisation automatique
- Jantes alu de 18 pouces
- Aide au stationnement avant et arrière
- Système de démarrage sans clé
- Feux au xénon
Oh oui !
- Equipement correct
- Charisme et caractère
- Design décalé
- Confort global
Oh non !
- Détails de finition
- Boîte CVT peu en rapport avec le dynamisme suggéré
- Consommation
Effectivement, elle a de la gueule. Mais pour 20 briques, j’ai l’outrecuidance de penser que ça ne suffit pas…
Heureux détenteur de ce gouffre de SP 95 en effet. Mais bon, je le savais, j’ai toujours eu des essences. J’ai opté pour la boîte manuelle 2 rm, mais malgré le gain de poids elle n’en reste pas moins poussive. Elle mériterait un meilleurs rendement, et de meilleures perfs vu les chevaux affichés. Après, à l’heure des radars uberisés et de la limitation à 80 km/h, les chevaux ne servent plus à rien, et la consommation redevient raisonnable 🙂
Heureux propriétaire depuis 65000 km. Aucun problème mécanique. De la gueule. Rare.
J’ai la version 2×4 boite mécanique.
J’ai un attelage et je tract mon bateau et mes remorques.
J’ai aussi une galerie et coffre de toit pour atteindre 800 l de chargement pour les vacances.
Consommation : certainement pas 10 l/100! Je fais 700 km avec un plein. Consomme 7.2 l/100 km en la prenant chaque jour pour le travail par portion de 50 km. Je roule peu en ville. Il faut savoir conduire avec un gros moteur! Les rapports se changent tôt….
Que du bonheur!
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