PAR BENOIT FAUCONNIER
Après deux ans de commercialisation, le Renault Scénic connaît sa première grosse évolution technique. Exit le bon mais vieux moteur 1.9 dCi 130 chevaux. Place au 1.6 dCi 130 baptisé Energy.
La puissance est le seul point commun entre les deux moulins. Le petit nouveau a été conçu à partir d’une feuille blanche, pour chasser le moindre gramme de CO2.
Outre une réduction de cylindrée significative (1.598 cm3), et un travail sur les frottements internes, le moteur Energy s’adjoint notamment les services d’un système Stop & Start associé à la récupération d’énergie au freinage et à la décélération, mais aussi d’un allongement des rapports de boîte de vitesses. La culasse, elle, compte désormais seize soupapes, et la distribution est non plus assurée par une courroie, mais par une chaîne. Le filtre à particules est bien entendu reconduit.
Avec cette artillerie lourde, Renault annonce un Scénic 1.6 dCi 130 qui émet 115 gr de CO2 par kilomètre, contre 145 pour le 1.9 dCi 130. La baisse des consommations devrait suivre la même proportion. D’après les mesures deL’Auto-Journal, effectuées sur un 1.9 dCi en 2009, et sur le tout nouveau 1.6 dCi, la consommation moyenne passe de 7.6 l/100 à 6.4. Le tout sans perdre ni sur les reprises ni les accélérations. A ce train là, on ne peut être qu’impatient de retrouver cette motorisation dans les Mégane berline et Estate, plus légères, et aérodynamiques. Leurs émissions de CO2 homologuées pourraient flirter avec les 100 gr.
Belles économies en perspective… Mais le nouveau 1.6 dCi n’est pas rentable dès la première impulsion sur le bouton « Start ». La facture à l’achat est alourdie de 400 € sur les Scénic et Grand Scénic. Durant quelques semaines, les deux motorisations ont été proposées au catalogue, avec cette différence de tarif. Autrement dit, en fonction du kilométrage parcouru, la différence à l’achat entre un 1.9 et un 1.6 n’est amortie par les économies de carburant qu’au bout d’un an ou deux… Passé ce délai, la conso moyenne plus favorable du 1.6 permet d’y gagner réellement question budget.
La même gymnastique s’impose pour qui hésite entre un 1.5 dCi 110, plus glouton que le 1.6 dCi 130. Mais entre les deux, la rallonge nécessaire s’élève désormais à 1.200 €. Sortez la calculette ! Le doute est permis d’un strict point de vue financier. En termes d’agrément, les 130 chevaux sont loin d’être superflus…
Vous allez me dire, quand on peut mettre 29.000 € dans un monospace compact, 400 € de différence, c’est peanuts. Peut-être, mais la démarche qui veut qu’on paye plus cher pour faire des économies a quelque chose de ridicule. Rouler dans des autos moins sales est à ce prix. Toutes les nouvelles technologies employées pour réduire les émissions de CO2 (cause noble, qu’on soit bien d’accord) ont un coût. Et au client de cracher au bassinet.
Renault n’est pas à accabler plus qu’un autre. On se souvient de la Volkswagen Lupo 3L, économe en carburant mais véritable ruine en prix d’achat. Citroën, aujourd’hui, fait payer ses versions e-HDI Airdream (avec boîte robotisée et Stop & Start) sur C4, DS4 et Picasso 1.000 € plus cher que les versions HDI 112 « traditionnelles ». Ca commence à faire cher du gramme de CO2 gagné. Comptez 430 € de différence entre un Volkswagen Touran TDI 105 classique et son pendant « écolo » baptisé Bluemotion. Peugeot, enfin, facture 900 € son label Blue Lion sur le 3008 1.6 HDI 112, en lui offrant la boîte BMP6. Du coup, les émissions passent de 130 à… 122 grammes, en théorie.
Chez BMW, le coût du progrès, en matière d’émissions de CO2, à l’achat, est encore plus compliqué à évaluer : les bluffantes 320d Efficient Dynamics (109 gr de CO2 par kilomètre pour une berline de 163 chevaux) sont vendues 350 € moins cher (hors bonus écologique) que les 320d classiques de 184 chevaux. Elles n’ont pas d’équivalence traditionnelle de même puissance. Audi, lui, a le bon goût de proposer au même prix son Audi A4 2.0 TDIe (136 chevaux) optimisée et moins gourmande par rapport à la 2.0 TDI classique de 143 chevaux.
La chasse au C02 et les normes Euro 6 auront immanquablement un impact sur le prix de vente des motorisations Diesel, leur enlevant au fur et à mesure de leur attrait économique. Les hybrides, comme la Toyota Prius, sont aussi plus coûteuses à l’achat, que leurs homologues 100 % thermiques. Se saigner à l’achat pour souffler à l’usage ? C’est le topo qui attend les acheteurs de voitures électriques : plus de 30.000 € la Citroën C-Zéro, ou 40.000 € le Chevrolet Volt pour avoir le plaisir de parcourir 100 km pour 2€ ?
Et si les constructeurs s’attaquaient à un autre facteur déterminant dans les émissions de CO2, c’est-à-dire le poids ? Les nouveaux matériaux employés (dont l’alu) sont tellement coûteux que la facture ne serait pas indolore non plus pour le client. Client, ou otage ?