PAR BENOÎT FAUCONNIER
Les dirigeants d’Heuliez ont demandé, mardi 18 mai, au tribunal de commerce de Niort, le placement de l’entreprise en cessation de paiements. Une procédure plus communément appelée « dépôt de bilan », qui semblait inéluctable, en raison de difficultés financières croissantes, et en l’absence de débouchés de quelque offre de reprise que ce soit.
Une énième guerre des nerfs a précédé cette demande : le mandataire ad hoc, Régis Valliot, avait milité, il y a plusieurs jours déjà, pour ce placement en cessation de paiements. Puis les dirigeants avaient demandé un délai pour examiner plusieurs offres de reprise. Lundi 17 mai, la direction d’Heuliez avait confirmé le caractère imminent du dépôt de bilan, avant de se raviser dans la journée… et finalemement s’y atteler réellement le 18.
Pour le mandataire ad hoc, le placement en cessation de paiements permet à l’entreprise de s’offrir un peu de répit pour examiner les offres de reprise, payer les salariés et les fournisseurs. Et enlever des mains des actionnaires principaux actuels, Bernard Krief Consulting, le destin d’Heuliez. L’an dernier, BKC s’était porté candidat à la reprise d’Heuliez, sans apporter, finalement, les fonds nécessaires.
Il y a quelques jours, Delamore & Owl, un groupe anglo-malaisien, était sorti du bois et avait exprimé son « étonnement » quant au non aboutissement de son offre de 25 millions d’euros contre 90 % du capital d’Heuliez. Une offre qui sera une nouvelle fois examinée, comme les autres, pendant la période d’observation qui devrait être prononcée prochainement par le tribunal de commerce de Niort. Une audience est prévue mercredi matin.
Cette fois-ci, c’est bien le tribunal de commerce qui se prononcera sur l’avenir du groupe Heuliez. Le placement en redressement judiciaire d’Heuliez devrait être prononcé, avec nomination d’un administrateur judiciaire. A l’issue d’une éventuelle période d’observation, le tribunal tranchera : ce sera la continuation de l’activité, avec un repreneur, ou la liquidation judiciaire, donc la mort d’Heuliez. Quatre dossiers de reprise passent des mains des dirigeants d’Heuliez à celles des juges.
De tergiversations en revirements, le feuilleton Heuliez commence sérieusement à peser sur les épaules des 600 salariés de l’usine de Cerizay, et celles des sous-traitants. Dernier tour de passe-passe en date : le sauvetage annoncé de l’entreprise par un investisseur turc, finalement auteur d’une offre jugée insuffisante. Le coup de Traflagar de trop, après la désillusion BKC et ses promesses non tenues.
Au milieu de ces pas de danse incongrus, six cents employés, donc, déjà troublés par l’hémorragie vécue l’an dernier dans les effectifs (moins 400 personnes), et une petite voiture vers tous les regards se tournent : la Mia, petit engin électrique en cours de développement, présenté à Genève, et qui attire pas mal de convoitises.
C’est là tout l’enjeu. Comment être certain, parmi les offres de reprise, de dénicher celle qui assurera un avenir à Heuliez, à la Mia et aux salariés. Et de la différencier de celles qui s’apparenteraient à une appropriation à bon compte d’un outil industriel et de brevets. Un simple achat de technologie (on n’a pas dit pillage en règle…) dont sont coutumiers certains fonds d’investissement raisonnant à court terme. Sur ce terrain-là, il se dit que le mandataire ad hoc avait déjà sa préférence, parmi les différentes offres de reprise… L’attente, elle, restera tout autant insoutenable.
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